Pourquoi m'as-tu abandonné ?

Psaumes 22.2

Trop souvent encore, l’imagerie populaire veut que le chrétien soit un « être à part », enfermé dans une bulle protectrice, à l’abri des violences de ce monde. Rien n’est plus faux ! Le croyant vit dans un monde dont il contribue à la construction. Il reçoit même parfois « des baffes en pleine figure ». Comme tout être, il a ses qualités et ses défauts. Quand les épreuves deviennent trop nombreuses, trop lourdes, trop incompréhensibles, le « pourquoi » se met à tourner dans la tête de l’homme et il se demande si Dieu se soucie encore de lui.

C’est une situation analogue que nous lisons dans le Psaume 22 : l’auteur se sent pris à la gorge, encerclé par ses ennemis et les bêtes sauvages à la gueule énorme et terrifiante. Et le secours du ciel ne vient pas… ou plutôt n’a pas l’air de venir. Ce silence de Dieu, cette distance entre le Créateur et la créature deviennent alors insupportables. Cela doit sortir, doit s’extérioriser et cela devient un cri : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?

Le Seigneur se laisse approcher, Il se laisse aussi interpeler. Pour vous en convaincre, relisez le livre de Job. Il accepte la plainte. D’ailleurs, l’auteur de ce chant n’accuse pas Dieu, il ne se persuade pas que Dieu se désintéresse de lui - il ne dit pas tu m’as abandonné -, il lui demande pourquoi. Ce même pourquoi que nous Lui adressons aujourd’hui encore, quand la maladie devient insoutenable, quand un être cher s’en va, quand l’injustice devient trop criante.

Tout comme Job, le psalmiste est persuadé que le secours ne peut venir que de ce Dieu en qui il a mis toute sa foi, toute sa confiance. Il ne va pas chercher des explications ou des justifications auprès de gens érudits, qui lui auraient sans doute laissé entendre que ce qu’il endurait était la conséquence d’un acte manqué ou d’une faute. En fait, ce cri du cœur, du plus profond de son être, est une louange au Tout-Puissant ; il sous-entend : Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? Je n’en sais rien ! Mais, je sais que Toi seul, tu peux m’aider, que Toi seul, tu peux entendre mon cri, que Toi seul, tu sais ce que je ressens.

Cette détresse, c’est aussi celle de tous les exclus de notre monde devenu hyper-compétitif, de nos sociétés dans lesquelles nous devons correspondre à un modèle, sous peine d’être recalé !

C’est dans l’absence que nos êtres disparus nous reviennent le plus intensément. C’est aussi dans le silence que Dieu nous parle. Il entend nos plaintes, il exauce nos prières, mais, trop souvent, nous ne voyons pas Sa réaction, parce que nous attendons autre chose, un « miracle » en quelque sorte. Il faut parfois, si ce n’est souvent, traverser la vallée sombre pour entrer dans le champ baigné de soleil. Il est nécessaire de beaucoup pleurer, pour pouvoir ensuite se réjouir.

Dieu ne nous abandonne pas. Il est prêt à nous entendre, à nous écouter. Il n’hésitera pas à agir et à réagir. La difficulté consistera à nous rendre compte de Sa présence à nos côtés dans les moments les plus pénibles, à découvrir la façon qu’Il aura choisie.

Source de l'image : Photo personnelle (c) printemps 2005.

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